Bail commercial,
Bon ou mauvais ?

Investir dans un bien sous bail commercial peut représenter une opportunité intéressante de revenus stables. Cependant, ce type d’investissement comporte aussi son lot de particularités et de risques. Que faut-il examiner avant de se lancer ? Voici les points essentiels, soutenus par des références juridiques pour vous éclairer dans votre démarche.
1. Avantages
d’un bail commercial
Revenus réguliers : En achetant un bien sous bail commercial, le propriétaire bénéficie généralement de revenus fixes, prévus dans le contrat signé avec un exploitant. La durée du bail commercial (généralement 11 ans ferme) garantit une certaine stabilité financière.
Gestion simplifiée : Dans de nombreux cas, les baux commerciaux incluent des clauses stipulant que l’exploitant est responsable de l’entretien courant du bien. Cela réduit la charge de gestion pour le propriétaire, qui délègue ces aspects à un locataire expérimenté. L’article L. 145-40-2 du Code de commerce précise que certains travaux sont à la charge de l’exploitant, à l’exception de gros travaux relevant de l’article 606 du Code civil.
Avantages fiscaux : Dans certains cas, l’achat d’un bien sous bail commercial permet de bénéficier de régimes fiscaux avantageux, notamment via le dispositif Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP) ou le Censi-Bouvard, si le bien est loué en résidence de services. Ces dispositifs permettent une récupération de la TVA et des réductions d’impôts.
2. Vigilance avant l’achat
Durée et conditions du bail :
Avant de signer, il est crucial de vérifier la durée restante du bail et ses conditions de renouvellement. Conformément à l’article L. 145-9 du Code de commerce, un bail commercial classique est conclu pour une durée minimale de 9 ans. Cependant, dans le cadre des baux commerciaux en résidences de tourisme, une particularité s'applique : le bail n’est pas résiliable tous les 3 ans par le locataire, contrairement à ce qui est prévu pour d'autres baux commerciaux. Cela signifie que le locataire est engagé pour toute la durée du bail, sauf stipulations contraires.
En fin de bail, le locataire peut demander un renouvellement, conformément à l’article L. 145-10 du Code de commerce. Toutefois, si le bailleur refuse ce renouvellement sans motif légitime (tel que défini à l’article L. 145-17 du Code de commerce, par exemple en cas de non-respect par le locataire de ses obligations contractuelles ou d'un projet de démolition de l'immeuble), le locataire peut réclamer une indemnité d'éviction.
Qu’est-ce que l’indemnité d’éviction ?
L’indemnité d'éviction est prévue à l’article L. 145-14 du Code de commerce et vise à compenser le préjudice subi par le locataire du fait de la perte de son droit au renouvellement. Elle inclut :
- La valeur du fonds de commerce ou du fonds exploité dans les lieux, évaluée en fonction du chiffre d’affaires et de la rentabilité du locataire.
- Les frais de déménagement et de réinstallation dans un lieu équivalent, ainsi que les éventuelles pertes de chiffre d'affaires durant cette période.
- Les éventuelles indemnités accessoires, telles que la perte de clientèle liée à un emplacement stratégique.
Il est donc essentiel pour le bailleur d’être attentif aux conditions du refus de renouvellement, sous peine d’engager sa responsabilité financière.
Bien sûr, ce n’est pas parce que la loi prévoit une indemnité d’éviction que tous les promoteurs-exploitants de résidences de tourisme l’appliquent !
Formules de location proposées par les opérateurs de résidences de tourisme :
Lors de la signature du bail commercial, les opérateurs de résidences de tourisme offrent généralement plusieurs formules aux propriétaires, leur permettant d’adapter l’utilisation de leur bien à leurs besoins et attentes. Ces formules incluent :
- Un loyer annuel maximisé : Cette option garantit un loyer annuel plus élevé, mais le propriétaire n’a aucun accès à l’appartement durant l’année. Le bien est entièrement dédié à la location touristique, optimisant ainsi les revenus locatifs.
- Un usage partiel du bien : Avec cette formule, le propriétaire peut profiter de l’appartement pour son usage personnel durant quelques semaines par an. En contrepartie, le loyer annuel versé par l’exploitant est réduit proportionnellement à la durée d’occupation personnelle.
Ces formules offrent une certaine flexibilité, permettant aux propriétaires de concilier revenus locatifs et usage personnel de leur bien, tout en tenant compte de leurs priorités, qu’il s’agisse de maximiser la rentabilité ou de profiter de leur investissement.
Chaque bail étant différent, il est important de bien connaître les spécificités du contrat pour estimer la rentabilité de l’appartement sous bail commercial.
Les loyers et leur révision : Les baux commerciaux peuvent inclure des clauses d’indexation du loyer pour compenser l’inflation. La révision du loyer suit l’indice des loyers commerciaux (ILC) ou l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT) et est encadrée par l’article L. 145-39 du Code de commerce. Toutefois, certains baux peuvent limiter les hausses de loyer, ce qui peut affecter la rentabilité à long terme.
Charges et travaux : L’acquéreur doit étudier les charges et travaux à la charge du propriétaire. L’article L. 145-40-2 du Code de commerce indique que le propriétaire supporte les travaux lourds, mais il peut être responsable d’autres charges. Une lecture attentive de l’état des lieux et des diagnostics est cruciale pour anticiper les coûts futurs.
Engagement de l’exploitant : Il est essentiel de vérifier la stabilité financière de l’exploitant. Un exploitant en difficulté peut se retrouver en incapacité de payer les loyers, ce qui fragilise l’investissement. L’article L. 145-41 du Code de commerce permet au propriétaire de résilier le bail en cas de défaut de paiement, mais cette procédure peut être longue et coûteuse.
3. Risques et inconvénients
Moins de flexibilité : Contrairement à un investissement locatif classique, un bien sous bail commercial laisse peu de liberté au propriétaire pendant la durée du bail. Ce dernier ne peut reprendre le bien pour un usage personnel ou pour le louer à d’autres conditions, ce qui peut constituer une contrainte. De plus, la reprise pour « motif légitime et sérieux » reste encadrée par l’article L. 145-17 du Code de commerce et nécessite une justification valable.
Valeur de revente : En raison des engagements contractuels, un bien sous bail commercial peut être moins attractif pour d’autres investisseurs qui recherchent de la flexibilité. La durée restante du bail, ainsi que les clauses du contrat, peuvent influer sur la valeur de revente du bien. L’acquéreur doit donc prendre en compte la possibilité que cette contrainte diminue l’attrait du bien pour les futurs acheteurs.
Conflits avec l'exploitant : Le propriétaire peut être confronté à des conflits en cas de non-respect des termes du bail par l’exploitant. Les litiges peuvent concerner l’usage du bien, l’entretien ou encore le paiement du loyer. En cas de manquement, le propriétaire peut demander la résiliation du bail selon l’article L. 145-41 du Code de commerce, mais il devra apporter la preuve des infractions, ce qui peut s’avérer long et coûteux.
Un investissement
à considérer
L’acquisition d’un bien sous bail commercial peut s’avérer être une bonne opportunité pour les investisseurs recherchant une source de revenus stable. Ils sont souvent revendus avec une belle plus-value lorsque le bien n’est plus sous bail. Cependant, cet investissement nécessite une vigilance accrue et une analyse approfondie des clauses du bail, des obligations fiscales, ainsi que des droits et devoirs du propriétaire et de l’exploitant.
Se faire accompagner par un agent immobilier aguerri permet de minimiser les risques liés à ce type d’investissement et de s’assurer que l’engagement est aligné avec les objectifs financiers de l’acquéreur.